17.12.08

Le Forum de Fredericton

5 décembre 2008


Tim a trouvé un autre véhicule après notre incident d’hier soir et c’est sous un ciel ensoleillé que nous suivons la route panoramique qui nous mène au Fredericton Arts Centre, où a lieu le dernier des Forums régionaux pour 2008.

26 personnes sont réunies dans la salle, un certain nombre d’entre elles signalant qu’elles ne pourront malheureusement pas rester pour toute la durée de la discussion. Une fois encore, je prends certaines libertés quant à l’ordonnance de la conversation et la disposition des sièges permettant un échange plus soutenu entre les participants, ma présentation d’ouverture est ponctuée de questions et de commentaires, ce qui rend cette partie de la réunion plus participative... Il faut croire que j’ai fini par accroître mon habileté à modérer une telle session au cours des deux derniers mois!

Les échanges ici se concentrent davantage sur les stratégies à développer pour mieux positionner arts et culture dans le débat public. En ce qui concerne les problèmes d’image du secteur, les participants au débat insistent sur l’importance de bien choisir notre vocabulaire – un thème développé hier lors de la consultation de Charlottetown. Il nous faut utiliser un langage le plus inclusif possible, mais il faut également être très concrets dans les exemples que nous utilisons. On doit montrer comment les artistes et les travailleurs du secteur culturel sont impliqués dans les différentes structures de notre société, dans l’économie, l’éducation, la santé, le bénévolat, etc. et faire voir comment ce sont des citoyens participants à part entière qui, en plus par leur travail, apportent une contribution toute particulière à notre identité et notre qualité de vie. Il faut combattre cette perception que nous sommes des « quêteux de luxe ».

Quelqu’un fait observer que notre travail de représentation devrait viser les politiciens à Ottawa en dernier lieu! Il faut d’abord travailler à la base, reconstruire notre image et notre légitimité au niveau municipal et provincial, approcher localement nos représentants politiques provinciaux et fédéraux, de façon à ce que le travail de la base puisse percoler jusqu’au niveau national. Il s’agit évidemment là d’une stratégie à long terme et il est bien entendu qu’entre-temps, les organismes nationaux, dont la CCA, doivent continuer à présenter les intérêts du secteur dans tous les enjeux de l’heure, tout particulièrement dans les contextes économiques et politiques actuels.

Enfin, sur le sujet de comment construire la solidarité et les consensus du secteur en général autour d’objectifs communs, une participante souligne le rôle crucial des communications et le besoin de faire des compromis. Ce sont là de toute évidences des compétences collectives qu’il faut développer!

La réunion se termine sur des suggestions intéressantes quant à la façon dont la CCA pourrait étendre les bases de sa légitimité – et éventuellement augmenter le revenu à sa disposition. Je ne manquerai pas d’en faire part à notre comité du membership.

10.12.08

Le Forum de Charlottetown

4 décembre 2008


Grâce à la générosité de Tim Borlase, membre du conseil d’administrationd de la CCA, qui a offert de me conduire en auto à l’Ile-du-Prince-Édouard pour la réunion d’aujourd’hui, j’ai enfin l’occasion de traverser le fameux pont qui relie l’île au continent. Tout au long de la route, nous suivons à la radio publique le drame politique historique qui se déroule dans la capitale nationale et comme nous arrivons à Charlottetown, le Premier ministre émerge finalement de Rideau Hall pour annoncer que la session de la 40ème Législature a été prorogée, ce qui permet au gouvernement d’éviter un vote de défiance de l’Opposition

Cela ne nous empêchera pas de tenir notre propre parlement dans une dépendance de la somptueuse maison Beaconsfield, face à la mer. Nous avons 26 personnes dans la salle, incluant le plus fort contingent d’artistes visuels rencontré lors de ces forums. La conversation est très animée et bien que les points de vue divergent souvent, ce parlement est si civilisé et discipliné que s’il le savait, le Président de la Chambre des communes envierait mon rôle de modérateur.

Une fois ma présentation d’ouverture terminée, la session plénière s’ouvre sur une discussion passionnée sur ce qui, selon une participante, devrait être la priorité du secteur, soit la promotion et la défense des formes élevées d’expression artistique. Selon elle, il faut défendre les oeuvres qui ont valeur durable et rejeter le mercantilisme et la culture populaire. Cette question est débattue sous plusieurs angles par les participants qui, tout en demeurant civils, rejettent cette notion et voient plutôt un continuum dans les diverses manifestations culturelles et artistiques. Ils s’inscrivent en faux face à une approche susceptible de diviser encore une fois un milieu qui cherche le consensus et l’unité d’action. Un autre participant souligne que si nous voulons convaincre de l’importance des arts ceux qui ont besoin de l’être, y compris les décideurs politiques, il faut utiliser leur langage et non pas essayer de les convertir au nôtre. Au total, il y a consensus dans le groupe quant à la sagesse d’une stratégie qui utilise le langage le plus inclusif possible lorsque l’on parle de culture.

Un participant avec de longs et distingués états de service dans le domaine des arts et de la représentation souligne le caractère cyclique des crises qui affectent le secteur, ce qui peut donner l’impression que nous faisons du sur place. Il dit qu’en concentrant nos efforts sur les politiciens, nous contribuons à perpétuer ce cercle vicieux car chaque fois que le personnel politique change, il nous faut recommencer à zéro. Mieux vaut travailler sur le long terme, avec nos enfants via l’éducation, avec nos voisins et nos communautés. Il faut accepter que le repositionnement des arts et de la culture dans la société canadienne est une entreprise de longue haleine.

Pur ce qui est des attentes face à la CCA, un intervenant considère que notre rôle le plus important continue d’être celui d’observateur attentif de ce qui se passe à Ottawa et d’en informer le secteur immédiatement et de façon claire et concise, tout en visant à intéresser le plus grand nombre sur des sujets parfois un peu ésotériques

Comme nous quittons la maison Beaconsfield, des milliers de corneilles ont envahi le ciel. Comme dans un cauchemar ou un film d’Hitchcock, elles forment de sombres guirlandes dans les arbres dénudés et couvrent litérallement le toit de la magnifique résidence du Lieutenant gouverneur. Le vacarme est assourdissant…

Cela devait être un présage car comme nous approchons de Moncton, les signaux d’alarme de la voiture s’allument un à un au tableau de bord et nous sommes chanceux de quitter l’autoroute avant de devenir une statistique! Le CAA prend le relais et il faudra que Tim trouve un autre véhicule pour aller à Frédéricton demain!

Le Forum de Moncton

3 décembre 2008

La salle qui nous a été gracieusement offerte par le théâtre Capitol de Moncton est à pleine capacité : 46 personnes, en très grande majorité francophones, se sont déplacées pour rencontrer le directeur de la CCA, entendre parler de l’organisation et discuter du thème des forums régionaux. Un constat s’impose d’entrée de jeu : la CCA est encore un secret trop bien gardé et sa mission peu connue. Il est vraiment important que nous travaillions d’arrache-pied à rehausser notre profil, ce qui se fera en partie par le réseautage que nous pourrons activer, donc accent à mettre sur les contacts interpersonnels et les chaînes de communication.

La vitalité de la communauté artistique acadienne est encore une fois très évidente et se réflète dans l’intérêt porté aux enjeux qui nous confrontent tous. Il faut dire qu’il se passe ici depuis quatre ans une expérience unique de mobilisation de tous les milieux (culturels, éducationnels, affaires, gouvernementaux de tous les niveaux, ensemble de la société civile) afin de développer une stratégie de développement socio-économique qui fait une large part à la créativité des milieux. Ce modèle fait rêver mais serait-il jamais possible de créer un mouvement semblable à l’échelle nationale? Il y a ici une identité collective séculaire et une prise en main de la communauté qui a peu d’équivalent, le tout doublé d’un raffinement politique qui a fait ses preuves.

Je ne m’arrêterai qu’à la discussion sur les priorités. Une des toutes premières concerne l’importance de réaffirmer le rôle du gouvernement fédéral dans l’appui à donner au secteur des arts et de la culture. Tant que ce pays aura la prétention d’être une entité distincte dans la communauté internationale, il incombe au gouvernement central d’appuyer notre culture, en collaboration avec les provinces, les municipalités et le secteur privé.

La promotion de l’économie créative, l’amélioration du statut socio-économique des artistes et créateurs et la démocratisation de la culture figurent au sommet des autres priorités que l’on propose pour la CCA. Mais on soulève, ici comme ailleurs, le besoin de travailler au réseautage entre les divers organismes culturels à travers le pays et la recherche de consensus autour d’objectifs communs et le développement de stratégies pour l’atteinte de ces objectifs. À ce chapitre, on invite la CCA à inscrire au sommet de toutes ses priorités la consultation, la concertation et le dialogue : cela mènera à l’engagement de toutes les parties et, éventuellement, à un accroissement des ressources à sas disposition.

Je quitte la réunion convaincu que dans la poursuite de ces objectifs, je pourrai compter sur la communauté acadienne. Qu’espérer de plus ?

Le Forum de St. John's, Terre-Neuve

2 décembre 2008


Qu’est que St. John’s et Winnipeg peuvent bien avoir en commun? Pas la température en tous les cas, car la capitale terre-neuvienne enregistre un record de 17o Celsius lors de mon arrivée! Non, le point commun c’est le nombre de participants au forum: huit. Mais ici comme là, j’assiste à l’une des discussions les plus animées. Il faut croire que c’est l’atmosphère d’un plus petit groupe, l’endroit magnifique (le superbe complexe culturel The Rooms, qui surplombe l’entrée du port de St. John’s) et, bien sûr, la qualité et l’énergie de ceux et celles qui se sont présentés pour la consultation de la CCA.

Compte tenu de la nature plus intime du groupe, nous nous retrouvons littéralement en table ronde et pouvons échanger librement sur les sujets proposés. Comme un peu partout ailleurs au Canada ces jours-ci, la conversation commence par des échanges de vues sur ls situation politique sans précédent à Ottawa et avec des hypothèses diverses sur la conclusion d’une situation égale à la pire des pièces de la commedia dell’arte.

Mais nous passons assez rapidement aux sujets du forum et l’on s’entend assez rapidement sur le fait que la présence des arts dans le débat électoral présente autant d’aspect négatifs que positifs. On constate ici comme ailleurs que le secteur a un problème d’image auquel il faut vraiment remédier et que nous faisons face à plusieurs défis si nous voulons identifier des objectifs communs à l’ensemble et établir des stratégies pour les réaliser. L’importance de l’Internet comme outil de communication et de mobilisation rencontre l’accord général.

Une grande part de la discussion porte sur la CCA elle-même, sur le rôle unique qu’elle joue et sur celui qu’elle pourrait jouer si elle était dotée de moyens suffisants. Un participant insiste sur le nom même de l’organisation, “conférence”, pour souligner la fonction essentielle d’établir une communauté d’esprit et d’intérêts. Cette fonction peut être réalisée de diverses façons, qui ne sont pas toutes coûteuses: une conférence nationale ou une tournée du pays peuvent coûter très cher à organiser, mais pas une série régulière de conférences téléphoniques avec des organismes-clé.

Le défi principal qui confronte la CCA est de rétablir des liens soutenus et signifiants avec ses et de les engager dans des perspectives, ses défis et ses activités. On s’entend pour dire que la CCA devrait explorer toutes les façons possibles de rétablir des liens avec le niveau provincial et de voir si elle peut assurer une liaison soutenue avec quelconque organisation est la plus inclusive et représentative dans l’une ou l’autre des provinces. On se demande quel rôle spécifique les membres du conseil d’administration de la CCA ont à jouer à cet égard et pourquoi ils ne sont pas plus visibles dans leurs régions respectives.

Sur la question du membership, une participante mentionne qu’il est important de préserver la possibilité pour une adhésion individuelle mais elle déplore le fait que les frais d’adhésion à ce chapitre soit si élevés: ne serait-il pas plus approprié pour la CCA de chercher validation, force et financement dans le plus grand nombre possible de membres individuels via des frais d’adhésion plus modestes? On suggère d’explorer la possibilité d’accorder, via une légère augmentation des frais d’adhésion individuelle aux organismes membres, un membership individuel automatique à la CCA.
Prochain forum demain à Moncton.

Le Forum d'Halifax

1 décembre 2008


Air Canada ne peut pas rejeter sur la température la responsabilité de ce cafouillage: j’arrive à Halifax avec quatre heures de retard, tout juste à temps pour le forum qui se déroule au Centre d’art de l’université Dalhousie. Très bonne participation: quarante personnes et plus, couvrant toutes les disciplines et incluant des représentants des trois niveaux de gouvernement. On me dit que je ne pouvais espérer de groupe plus représentatif de la scène artistique et culturelle néo-écossaise.

Je n’ai aucune difficulté à le croire. Les échanges sont animés et les perspectives variées, ce qui n’empêche pas un large consensus sur les principaux enjeux auxquels nous faisons face par les temps qui courrent. Un participant qui a lu mes blogs jusqu’ici se dit un peu découragé d’y voir peu de nouveau: la communauté artistique fait les mêmes constats depuis plusieurs années et il y a peu d’idées nouvelles et peu de progrès de fait.

J’avoue que je suis encore relativement nouveau dans le secteur (même après trois ans!) et qu’il se peut que je sois porté à un optimisme sans fondement, mais il me semble que l’évaluation de la situation actuelle devrait être plus positive. Au cours des forums régionaux jusqu’ici, j’ai senti un désir réel de voir le milieu surmonter ses divisions et ses perspectives trop étroites. Il me semble que les temps sont mûrs pour la création d’un plus vaste consensus autour d’objectifs communs et de stratégies coordonnées. À coup sûr, si cette volonté existe vraiment, nous allons bien trouver les moyens de la traduire en actions?

Dans un autre ordre d’idées, un certain nombre de personnes expriment de sérieuses préoccupations quant à la possibilité que le gouvernement fédéral décide de remettre aux provinces la responsabilité des arts et de la culture. Se pourrait-il en effet que le gouvernement prenne prétexte du rôle que les artistes et travailleurs culturels ont joué dans la dernière élection pour se dégager de ses responsabilités face à ce secteur d’activité? Il ne faut pas oublier qu’exception faite de la radiodiffusion et du droit d’auteur, qui sont de compétence fédérale exclusive, la Constitution est silencieuse quant à qui a la responsabilité pour les arts et la culture!

Ici comme ailleurs, les participants insistent sur l’importance d’avoir recours à une définition des arts et de la culture qui soit large et inclusive et sur la nécessité pour le secteur d’établir des alliances avec d’autres secteurs de la société qui partagent au moins en partie ses préoccupations et sont convaincus de l’importance de la culture dans nos vies. On souligne combien il est crucial de travailler pour que l’appréciation des arts et un minimum de formation artistique fasse partie des programmes scolaires, particulièrement au primaire et au secondaire, si l’on veut un jour voir changée la perception que la culture est un luxe réservé aux élites. Les arts sont partie intégrante de notre vie quotidienne, d’un façon dont plusieurs ne se rendent même pas compte et tout repositionnement du secteur dans la société canadienne commence par l’école.